L’accablant soleil de la journée du vendredi n’était pas un obstacle au fil des milliers de parakois sortis pour forcer la machine Bako à enregistrer leurs identités. C’est une véritable course contre la montre. Les hommes des diverses catégories sociales alignés les uns derrière les autres, les regards anxieux n’espéraient qu’une seule chose : empêcher l’hypothèque de leur droit de vote au cours de la décennie à venir. Mais cette gente n’était point la seule dans la bataille. L’on croise également sur ces lieux de jeunes gens, heureusement dispensés des classes ce jour là pour participer au marathon de l’archivage de leurs données biométriques. Des femmes, pour la plupart les têtes couvertes religieusement d’un foulard blanc ou noir attendaient aussi d’être avalées par les machines. Le retard accusé dans le convoiement de ces kits n’influencera en rien le délai annoncé. Et ils n’en sont pas dupes. Pour cela, il faut hausser le ton, crier haro sur les agents qui trainent le pas sur une opération qui aura duré la traversée du désert. Entre les poussières soulevées par ces centaines de couples de pieds et les vociférations d’injures pérorées par ces gueules abondantes, la mission des agents affectés à la tâche était bien difficile à remplir. La nuit s’approche et il faut courir car bientôt, le travail sera plus pénible. Pour prendre en compte le plus de béninois possible, le travail a continué tard dans la nuit. Pourtant, il restait encore assez du monde dont les choix de vote auraient certainement changé les résultats. Véritable casse tête mais le temps, hélas n’est pas aux plaintes. Il faut bien en finir car les élections sont prévues pour le dimanche. C’est dans ce cafouillage, cette perte d’espoir qu’une femme enceinte renversée par le monde fou des oubliés de la lépi s’est retrouvée sous une moto stationnée toute proche. Ses cris et hurlements n’auront alerté personne. Au contraire, la moto dont elle supportait la charge sera piétinée par plus d’un. L’arrivée des pompiers et son transport vers un centre auront été trop tardifs, peine perdue. Comme elle, ils sont nombreux ces béninois à souffrir de cette situation.