Le président Boni Yayi, dans l’euphorie des premiers jours de son élection avait promis ciel et terre aux béninois. Les plus habiles de ces populations béninoises avaient arraché des paquets de promesses au nouveau président décidément venu pour changer le cours des choses. Mais le chef de l’état n’était pas arrivé avec un bâton magique. C’est d’ailleurs pourquoi bon nombre de ses engagements n’ont pas pu être tenus. Dans cette course aux promesses arrachées d’antan, les parakois s’étaient vus attribuer la construction dans leur ville d’un aéroport international et d’un port sec. Mais depuis, rien n’a bougé. Et les élections s’approchent. Comme une menace. Comme une sanction.
Le lancement
La ville de Parakou a toujours été vue comme un fief du chef de l’état. Mais les choses risquent de prendre une nouvelle allure dans les jours à venir. Et pour cause, des voix commencent par s’élever pour dénoncer l’état de léthargie dans lequel la 3e ville à statut particulier du bénin est restée depuis 2006. Outre la pose de quelques décamètres de pavés, plus rien n’a bougé. Or, certaines villes du pays comme celle de Porto-Novo ont montré leurs capacités à s’auto développer dans un environnement comme celui de la décentralisation qui ombrage les communes du bénin. La cité de Kobourou est restée en marge de ce marathon au développement local. Plusieurs observateurs y voient la cause toute proche. Cet état de chose serait dû au fait que le maire Soulé Allagbé fait la courbette au chef de l’état et ne peut donc pas dans cette situation revendiquer avec le même courage et la même détermination que ses collègues des autres communes. De plus, les quelques projets que les parakois ont la chance de voir lancés chez eux n’ont pas bougé. Celui particulièrement de la construction du port sec était capital. A l’époque, le chef de l’état avait décrit Parakou comme « une ville de transit », « un important pole économique », « un carrefour du bénin septentrional » ; ce port devait « désengorger » celui de Cotonou et constituer ainsi un important centre d’affaires. Tellement le projet était viable qu’un parterre d’opérateurs économiques avaient assisté à la cérémonie de la pose de sa première pierre le 23 février 2008.
L’état des lieux près de deux ans après le lancement officiel
Le site devant abriter le port sec de Parakou est situé au quartier Ganon bien loin derrière le complexe textile du bénin (Coteb). A la place d’un périmètre clôturé avec une administration, des titans et des marchandises de diverses sortes, l’on voit plutôt une forêt en développement. Des arbres et des plantes de toutes sortes disputent le terrai avec les rats et autres bestiaux de la brousse. Entre le chant des oiseaux, seuls heureux de la situation, l’on entend depuis le site la voix des populations vivant aux environnements de ce qu’il convient d’appeler aujourd’hui un éléphant blanc. D’ailleurs, ces populations n’habitaient pas seulement les environs. Bon nombre d’entre eux résident sur une partie du site. Approché, l’une d’elles, Dame Emilienne Kessou nous a confié qu’elle réside là depuis plus d’une décennie. A son instar, Karim Chabi nous a exprimé sa désolation de la manière dont le maire Soulé Allagbé et le chef de l’état gèrent ce dossier. A ses dires, ils avaient reçu une injonction de quitter les lieux sans une quelconque procédure d’expropriation. C’est pour cela qu’il jure ne jamais quitter les lieux sans si l’état ne lui indique un autre domaine sur lequel il pourra désormais résider avec sa famille. Cette situation n’est pas particulière à ces deux témoins rencontrés. Toute la populace habitant l’une ou l’autre partie du site chante la même mélodie. Cependant, à voir de près la situation, ils risquent de ne jamais quitter la zone. La raison est toute simple. La réalisation de ce projet semble de très loin être une priorité pour le gouvernement. D’ailleurs, de sources proches de l’assemblée nationale, le gouvernement ne prévoie rien dans le projet de loi de finance 2011 pour la réalisation de ce projet. Pourtant, au lancement du projet ce 23 février 2008, le chef de l’état et le maire de Parakou aveint promis et juré que les travaux commenceront deux jours plus tard c'est-à-dire le 25 février de la même année. Près de deux ans, seule une plaque gite sur le terrain mentionnant que c’est le ministère délégué auprès du président de la république chargé des transports qui devrait conduire le projet. En ce moment, le ministre Nicaise Fagnon a d’autres chats à fouetter. Et les habitants de Ganon peuvent donc continuer de vivre paisiblement. D’ailleurs, ils ne risquent pas d’être inquiétés au cours des prochaines années.
Qui payera la facture ?
Il fallait 15 milliards à Boni Yayi pour concrétiser ce projet dont il a personnellement pris l’initiative tout seul. Il avait sans doute mesuré les contours de ce projet avant de le lancer. Ne pas parvenir à le réaliser, ni même à effectuer les premiers travaux pouvant donner une lueur d’espoir aux populations de cette région doit certainement être suivie de conséquences. Mais qui payera la facture ? Le président de la république n’a pas été seul à préparer cet désormais éléphant blanc. Son premier acolyte a été et reste Soulé Allagbe, le maire de la municipalité de Parakou. Sans même ce dossier, les habitants de la commune avaient promis et sont entrain de planifier une sanction pour leur maire. La tentative de destitution enclenchée récemment entre dans le cadre de cette sanction. Ainsi, lors des prochaines élections communales, le maire e Parakou aura peu de choses à dire aux princes de la cité des Kobourou. La non concrétisation du projet de construction de ce port sec comme toutes les autres promesses de Yayi devront être payés par le maire pour l’avoir suivi et défendu sans relâche. Mais avant ces lointaines élections locales, ce sont les élections présidentielles qui sont imminentes. Que viendra encore annoncer le chef de l’état aux parakois qu’il n’avait promis auparavant ? Ces populations n’attendent donc que février et mars prochains pour demander des comptes au chef de l’état. En cette occasion, le sujet Ganon sera incontestablement aux débats. Yayi pourra t-il jurer avoir donné toutes les instructions nécessaires pour engranger la construction u port ? Cette farce serait de très mauvais augures. Le chef de l’état gagnera beaucoup mieux à ne pas avancer des arguments genre « je ne suis pas au courant », « je n’étais pas informé ». Mais alors, les parakois pourront-ils lui pardonner ? Lui apporteront-ils leur soutien lors des prochaines consultations ? Rien n’est gagné à l’avance. Mais l’on peut également voir les évènements changer de cours dans les prochaines semaines. Alors là, l’on verra certainement des machines prendre d’assaut le terrain pour le défricher et poser quelques briques avant les campagnes électorales. Alors là, l’on verra des ingénieurs, des casques sur la tête et la mine bien faite. Alors là, le maire fera des séances de travail, des déplacements réguliers le long des trois semaines sur lesquelles les travaux seront étalés. Alors là, le président de la république se déplacera personnellement sur le site avec une forte délégation, des files de voitures, des politiciens en costume. Alors peut être là, Yayi Boni pourra souffler. Mais pour l’heure, l’on est encore loin de ce scénario. Tout court. Tout bouge. Seul, Boni Yayi est en marge de ce mouvement. Mais il payera assurément la facture.